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En moins de quatre mois, le parlement aura voté la nouvelle loi sur la fonction publique. Les phases de concertation avec les syndicats aussi bien que les débats parlementaires ont démontré que s’affrontent toujours les tenants de la survivance du statut de la fonction publique et ceux qui veulent sa disparition. Le clivage gauche/droite est réapparu, mais les relations entre l’Assemblée nationale et le sénat se sont apaisées et les différentes lectures du texte ont mené normalement à une commission mixte paritaire conclusive.

Le texte de loi : une petite centaine d’articles contre 36 au départ.

L’assemblée nationale a déposé en commission 2033 amendements dont 280 ont été adoptés en séance publique. Le Sénat, pour sa part, a déposé en commission 1030 amendements dont 279 ont été adoptés en séance publique. Anicet Le Pors, le père du statut de 1983/1984 disait que pour réformer la fonction publique, il faut aller vite. Le gouvernement a été plus que rapide puisque le texte a été adopté en moins de quatre mois malgré l’opposition farouche et unanime des syndicats. C’est pourquoi le secrétaire d’Etat Olivier Dussopt n’a pas pu cacher son contentement ” tous les objectifs du gouvernement sont atteints”, tout ce qui n’a pas pu y être intégré sera traité par ordonnance. Certains spécialistes qui ne souhaitaient pas laisser des sujets trop techniques être traités par les parlementaires se réjouissent de régler par ordonnances des dossiers aussi sensibles que la formation des hauts fonctionnaires ( et en particulier l’avenir de l’INET ) ou la protection Sociale complémentaire des agents.

Le Parlement a habilité le gouvernement à légiférer par ordonnance sur huit sujets :

  • tout d’abord sur le sujet des accords locaux et nationaux
  • ensuite sur cinq sujets concernant la santé et les congés des fonctionnaires
  • puis sur le sujet du code de la fonction publique
  • et enfin sur le sujet très clivant de la formation des fonctionnaires

 

Cette loi sur la fonction publique n’est que la première marche d’autres réformes à venir.

Mais elle contient déjà en elle les matériaux susceptibles, peut-être pas encore de la transformer, mais tout au moins de la faire évoluer pour reprendre l’expression entendue à l’issue de la commission mixte paritaire. Et en tous cas, pour tenter de calmer les esprits, le Ministre , la rapporteure de la loi à l’Assemblée Nationale et d’autres se défendent de faire du “fonctionnaire bashing”, rappelant l’importance du statut de la fonction publique et faisant remarquer que grâce à cette loi, les fonctionnaires obtenaient de nouvelles garanties et perspectives de mobilité.  

Certaines mesures, prises au prétexte d’améliorer l’image des fonctionnaires, donnent un sentiment de fermeté.

Par exemple, l’inscription dans la loi des 1607 heures annuelles de travail pour la fonction publique de l’État et applicables aux deux autres versants de la fonction publique. C’est la fin des dérogations au temps de travail antérieures à 2001 dans la territoriale. Autre exemple, le régime durci pour les fonctionnaires momentanément privés d’emploi, à tel point que la CGT dénonce cette réduction des droits des fonctionnaires momentanément privés d’emploi, en raison de la moindre prise en charge de leur rémunération comme n’ayant pour seul objectif que de faciliter les privatisations et les suppressions d’emplois.  

La loi veut également davantage de transparence sur la réalité du travail dans la fonction publique.

Et plus particulièrement dans la fonction publique territoriale avec la mise en place du rapport Social unique et de la base de données Sociales qui révéleront au grand jour la photographie des effectifs, des rémunérations, des parcours professionnels et de l’égalité professionnelle. A noter que les collectivités et les EPCI de plus de 80 000 habitants devront publier leurs dix plus hautes rémunérations.  

Finie la prétendue rigidité du statut !

Le législateur a fait le choix d’ouvrir la fonction publique et de faire sauter tous les verrous qui irritaient tant employeurs et directions des ressources humaines. Certaines brèches ont donc été ouvertes dont l’ouverture aux contractuels et l’incitation aux allers-retours entre le public et le privé. En ce qui concerne le recours aux contractuels, ce dernier est facilité sans distinction de catégories. Dans les communes de moins de 1000 habitants et dans les EPCI de moins de 15 000 habitants, tous les emplois sont aujourd’hui ouverts aux contrats. Mieux ! Le seuil pour le recrutement direct des emplois de direction est ramené à 40 000 habitants, et le contrat de projet est créé pour toutes les catégories de collectivités. Les employeurs territoriaux disposeront de davantage de souplesse et plusieurs outils du privé apparaissent dans le public : la rupture conventionnelle ( expérimentale pendant cinq ans pour les fonctionnaires ), la rémunération au mérite collectif, la révision des procédures disciplinaires, la limitation du droit de grève dans les collectivités…  

La loi crée les lignes directrices de gestion :

Comme l’indiquait Philippe LAURENT, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, ” les employeurs territoriaux vont devoir prendre conscience de leur rôle et penser leur politique RH “. En effet, la loi crée les lignes directrices de gestion, un outil qui déterminera la stratégie pluriannuelle de la collectivité en matière de ressources humaines : gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, orientations générales pour la promotion, valorisation des parcours professionnels… Mais, les employeurs devront aussi composer avec le nouveau comité Social territorial, issu de la fusion du comité technique et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Enfin, le texte instaure une prime de précarité pour les CDD d’un an et moins, et il prévoit une pénalité en cas d’absence ou d’obsolescence de plan d’actions en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.”