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Inséré dans la constitution lors de l’acte II de la décentralisation, le principe d’autonomie financière est censé garantir aux collectivités un volant déterminant de ressources propres. Ce principe à valeur constitutionnelle fut écorné à plusieurs reprises ces dernières années. C’est pourquoi, lors de l’examen du récent projet de révision constitutionnelle, en stand by pour le moment, plusieurs amendements ont été rédigés afin de lui substituer un principe d’autonomie fiscale qui serait plus protecteur. La future réforme de la fiscalité locale prévue pour avril 2019 pourrait apporter un nouveau développement à ce projet.

Qu’est-ce que la notion d’autonomie financière ?

Si la matière fiscale relève du domaine de la loi, l’article 72 de la constitution prévoit également que le parlement puisse déléguer certaines de ses attributions aux collectivités territoriales en les autorisant à fixer le taux ou à déterminer l’assiette de certains impôts qu’elles perçoivent. Toutefois, aucun texte n’assurait la préservation d’un volant minimal de recettes fiscales dans les budgets locaux ni ne précisait les conditions de financement des compétences transférées par l’état. C’est l’acte II de la décentralisation qui va mettre en oeuvre deux nouveaux textes successifs.   1) la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 introduit un article 72-2 dans la constitution qui institue un principe d’autonomie financière, lequel impose que ” les ressources propres des collectivités territoriales représentent une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. Les transferts de compétences doivent donner lieu à l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Les créations ou les extensions de compétences doivent, quant à elles, être accompagnées de ressources déterminées par la loi.   2)  La loi organique du 29 juillet 2004 est ensuite venue apporter deux précisions quant au calcul du ratio d’autonomie financière :  d’une part, les ” ressources propres ” englobent les impôts dont la loi détermine par collectivité le taux ou une part d’assiette locale, ainsi que diverses autres recettes incluant les redevances perçues au titre de la gestion de certains services publics, les produits du domaine…  d’autre part, la ” part déterminante ” s’apprécie par catégorie de collectivités, en référence aux ratios constatés en 2003, soit :  60,8% pour le bloc communal,   58,6% pour les départements  et  41,7% pour les régions.

Paradoxalement, ce principe d’autonomie financière a été affirmé par la loi au moment même où l’on a constaté une dégradation continue des marges de manœuvre fiscales des collectivités territoriales. Plusieurs explications à cette dégradation :  1) la multiplication des allègements fiscaux décidés par l’état.  2) la concentration depuis 2009 des impôts modulables sur le bloc communal.  3) le financement des transferts de compétences effectué prioritairement par l’attribution de fractions d’impôts nationaux.  4) la lecture extensive de la notion de ressources propres qui a conduit à inclure au numérateur du ratio, non seulement, et à juste titre, les impôts modulables; mais s’agit-il toujours de ressources propres quand on y ajoute aussi les impôts à l’assiette locale même si le taux ou le tarif est fixé nationalement, et surtout les impôts transférés dont ni le taux, ni l’assiette ne sont territorialisées.  5)  enfin, le fait que l’autonomie financière soit appréciée en fonction d’un seuil plancher fixé en valeur 2003 n’a pas permis d’engager une réflexion de fond sur le niveau réel de ressources propres nécessaire pour les collectivités territoriales.

Ce constat a amené la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale à proposer de réécrire l’article 72-2 de la constitution en faisant référence, non plus à l’autonomie financière, mais à ” l’autonomie financière et fiscale ” des collectivités territoriales. Ce nouvel article présenterait une définition plus stricte de la notion de ressources propres qui exclurait la fiscalité transférée et dont le poids serait apprécié en référence à un seuil minimal de recettes propres préétabli. Les députés préconisaient également une compensation intégrale mais surtout EVOLUTIVE des transferts de compétences, lesquels feraient en outre l’objet d’évaluations régulières par un organisme indépendant.

Ces propositions de la délégation, qui bousculent le droit fiscal actuel, devraient être reprises et examinées lors du grand débat sur la réforme de la fiscalité locale d’avril 2019.