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Première ressource économique du monde local, la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises est partagée entre le bloc communal ( 26,5% ), le bloc départemental ( 23,5% ),et le régional (50% ). La CVAE taxe la valeur ajoutée des entreprises, c’est à dire la différence entre les ventes et les charges externes au taux de 1,5%. Les PME de moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires bénéficient d’une réfaction de taux d’autant plus forte qu’elles sont petites. C’est le ” dégrèvement barémique ” que l’état prend intégralement en charge pour un montant de 4 à 5 milliards d’euros par an.

Les entreprises acquittent la CVAE d’une année N en trois temps :

1) juin et septembre de l’année N, deux acomptes de 50% chacun, provisoirement calculés au vu de la CVAE de N-1.

2) mai de l’année N+1, le solde de l’année N établi au vu de la valeur ajoutée définitive de N. L’Etat reverse aux collectivités en N+1 les sommes recouvrées en N ainsi que d’éventuels redressements et le dégrèvement barémique adossé aux soldes. Ce tempo a plusieurs effets. Il permet une notification du produit définitif de CVAE dès le début d’exercice.

3) D’autre part, en N, les collectivités perçoivent des acomptes de N-1 en même temps que des soldes de N-2. Cette superposition est une des principales causes de la volatilité de la CVAE. Enfin, lorsqu’une entreprise possède plusieurs sites, sa valeur ajoutée est éclatée entre les différentes communes d’accueil selon un barème tenant compte des valeurs locatives pour 1/3 et des effectifs pour 2/3.

La CVAE devait réorienter l’impôt économique local de l’industrie ( qui est délocalisable ) vers les services, et elle a donc favorisé les régions qui accueillent des sièges sociaux et des bureaux au détriment des régions industrielles. Le FNGIR et la DCRTP ont permis de rééquilibrer les plateaux, mais ils l’ont fait en valeur 2010 pour être figés ensuite. Les territoires de services s’enrichissent plus vite que ceux hébergeant des usines. Soucieux d’atténuer cette distorsion, le législateur a commencé, en 2011 et 2014, par surpondérer les effectifs et les valeurs locatives des établissements industriels, puis, en 2016, en décidant que, dès 2018, la valeur ajoutée répartie entre territoires serait celle des groupes et non celle des sociétés. Mais, la LFI 2018 a abrogé la mesure avant qu’elle ne soit mise en application.

Suite à l’abrogation par la LFI 2018 de la mesure décidant que la valeur ajoutée répartie entre les territoires serait celle des groupes et non celle des sociétés, les territoires industriels durent tirer un trait sur le bonus de CVAE attendu ( 30Md’euros pour l’Isère par exemple! ). Mais, le problème reste pendant! La version 2018 du rapport que, selon la LFI 2018, le gouvernement est tenu de rendre annuellement sur la CVAE devra traiter d’une modification de ses clefs de répartition à compter de janvier 2019. Sera-t-il donné suite alors au rapport sénatorial Guéné-Raynal de juin 2017 qui propose d’utiliser les deux clefs pondérées pour répartir, non plus la CVAE des sociétés ou groupes multi-sites, mais l’intégralité de la CVAE nationale, ce qui aboutirait à une déterritorialisation partielle de l’impôt ?

Comment éviter l’optimisation fiscale au sein des groupes? Le taux de CVAE augmentant avec la taille de l’entreprise, certaines n’ont pas hésité à se saucissonner. Mais, la riposte n’a pas tardé. Dès 2011, les sociétés membres de groupes ayant opté pour l’intégration fiscale de l’impôt sur les bénéfices ont dû déterminer leur taux de CVAE au regard du chiffre d’affaires consolidé. En mai 2017, le conseil constitutionnel a censuré cette disposition au motif d’une discrimination entre les groupes ayant opté et ceux qui ne l’ont pas fait. La LFI 2018 a rétabli dès 2018 la consolidation des chiffres d’affaires de référence en l’étendant à tous les groupes éligibles à l’intégration fiscale, qu’ils aient ou non saisi l’option.

Comment réduire la volatilité de la CVAE ? La CVAE connaît des soubresauts sans lien avec les variations de l’économie locale qui en affectent la prévisibilité. Les facteurs de volatilité parasite sont multiples :

1) un effet mathématique d’amplification des variations de croissance économique locale dû aux modalités de règlement de l’impôt,

2) des irrégularités dans les rythmes de paiement des contribuables,

3) l’instabilité de la clef effectifs déclarés par les entreprises,

4) les redressements noyés dans la masse.

Il existerait une solution simple mais rarement évoquée : celle où l’état, au lieu de verser aux collectivités ses encaissements de l’année N-1 ( acomptes N-1 + soldes N-2 ), verserait une campagne complète de CVAE ( acomptes N -2, perçus en N-2 + soldes N-2, perçus en N-1 ) et où il distinguerait les redressements à l’image des rôles supplémentaires des impôts cadastraux.