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Après un marathon parlementaire lié à l’adoption du budget 2023 de l’État, et après le recours massif à l’article 49.3, la première ministre, Elisabeth Borne, a engagé pour la dixième fois la responsabilité de son gouvernement pour faire adopter définitivement l’intégralité du projet de loi de finances pour 2023 sans vote le 17 décembre 2022. La motion de censure, déposée par les groupes issus de la NUPES n’ayant pas été votée.

En sus des particuliers et des entreprises, fortement touchés par la crise sanitaire, les collectivités ne dérogent pas à la règle. En effet, les exécutifs locaux sont inquiets quant à l’absorption de cette hausse par les budgets. C’est ce qui ressort à l’issue des congrès départementaux et du congrès national des maires et des présidents d’intercommunalité de France. Pour certaines communes, les hausses vont du double au triple. Cela emmène donc à réfléchir au report des investissements prévus en 2023, voire à les annuler, et /ou à réfléchir à l’augmentation des recettes, au travers du seul levier qui reste aux collectivités : le taux de taxe foncière.

Les élus locaux, soutenus par le Sénat, ont tiré la sonnette d’alarme et demandent un soutien de l’État afin de préserver les capacités opérationnelles des collectivités territoriales, qui sont les premiers investisseurs publics, et éviter des hausses trop importantes de taux de taxe foncière, corrélée à une hausse des bases fiscales de 7 % en 2023.

Au travers de l’adoption définitive du projet de loi de finances pour 2023 (PLFI 2023), le gouvernement prévoit une série de mesure pour répondre aux inquiétudes des élus. Outre la suppression de la CVAE étalée sur deux ans, l’augmentation de la dotation globale de fonctionnement pour un montant de 320M€, le décalage de l’actualisation des valeurs locatives d’habitation et la création d’un fonds vert, l’État s’engage via quatre dispositifs.

La reconduction du filet de sécurité pour 2023

Déjà mis en place pendant l’été, dans le cadre de l’adoption de la loi de finances rectificative pour 2022, le dispositif « filet de sécurité » avait pour principal objectif de soutenir les collectivités dans une période d’augmentation des dépenses, causée par la revalorisation du point d’indice et une inflation galopante.

Concrètement, le soutien étatique est divisé comme ceci :

  • 50 % de la hausse des dépenses constatées en 2022 au titre de la revalorisation du point d’indice

Exemple : Une commune voit ses dépenses de personnel en augmentation de 60k€ sur un budget personnel de 2M€, l’État prend en charge 50 % des 60k€ soit 30K€.

  • 70 % des hausses de dépenses d’approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain et d’achat de produits alimentaires constatées en 2022

Exemple : Une commune voit ses dépenses au chapitre 011 en augmentation de 300K€, causées par l’inflation, l’État prendra en charge 70 % soit 210k€.

Le gouvernement a répondu à l’urgence avec la mise en place d’un mécanisme d’acompte versée à environ 2 000 communes sur les 11 000 collectivités bénéficiaires de ce dispositif.

Pour bénéficier de ce dispositif en 2022, il fallait répondre à ces 3 critères cumulatifs :

  • Un taux d’épargne brute (ou capacité d’autofinancement) 2021 inférieur à 22 % ;
  • Un potentiel financier ou fiscal par habitant inférieur au double de la moyenne de la strate ;
  • Une perte d’au moins 25 % d’épargne brute en 2022, du fait principalement de la hausse des dépenses d’énergie et d’alimentation, et de la revalorisation du point d’indice ;

Le Projet de loi de finances pour 2023 reconduit ce dispositif en l’étendant aux départements et aux régions et en modifiant les critères afin de le rendre plus accessible :

  • Un potentiel financier ou fiscal par habitant inférieur au double de la moyenne de la strate ;
  • Une perte d’au moins 15 % d’épargne brute en 2022 ;

Pour les collectivités éligibles, la dotation remboursera la différence entre la progression des dépenses d’énergie et 50 % de la hausse des recettes réelles de fonctionnement.

Lire l’article : Budget, affectation du résultat

Le bouclier tarifaire

L’accise sur l’électricité, autrefois dénommée CSPE (contribution au service public d’électricité) ou encore TICFE (Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité) va connaitre une diminution qui profitera à toutes les collectivités. Cette taxe est ramenée au minimum autorisé par l’Union Européenne, soit :

  • 1 €/MWh pour les petites collectivités éligibles aux TRV (tarifs réglementés de vente de l’électricité) ;
  • 0,5 €/MWh pour les autres structures locales.

Autre point d’amélioration qui s’adresse à 30 000 communes, le gouvernement prévoit la possibilité pour les petites communes de pouvoir bénéficier du bouclier tarifaire, déjà appliqué aux entreprises et aux particuliers. Ce dispositif s’adresse exclusivement aux collectivités :

  • Ayant moins de 10 employés ;
  • Moins de 2M€ de recettes ;
  • Ayant contractualisé une puissance inférieure à 36kVa et qui sont éligibles aux tarifs réglementés de vente de l’électricité.

La mise en place d’un amortisseur électricité

Pour les communes ne répondant pas aux critères dégagés par le filet de sécurité et par le bouclier tarifaire, il est prévu la mise en place de l’amortisseur électricité.

De façon plus concrète, l’État va prendre en charge une partie de la facture d’électricité dès que le prix au MWh dépasse un certain seuil (180€/MWh). Au-delà de ce seuil de 180€/MWh, l’État prend en charge 50 % des volumes d’électricité (environ 20 % sur la facture totale).

Afin de pouvoir simuler cette baisse de dépenses, l’État a mis en place un simulateur disponible à cette adresse : https://www.impots.gouv.fr/simulateur-amortisseur-electricite

L’État souhaite donc aider les collectivités à surmonter cet épisode complexe, dans un environnement contraint, car l’État doit en même temps réduire ses dépenses publiques pour répondre à ses engagements européens et internationaux. Est-ce suffisant ?

 

 

Geoffrey PAYRE

Consultant Finances Locales, Pôle Expertise et Conseil