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Les grandes orientations de la réforme de la fiscalité locale sont désormais connues et confirmées officiellement par le gouvernement. Il s’agit de transférer la part de taxe foncière des départements aux communes, de donner une part de TVA aux collectivités, de poursuivre la réforme des valeurs locatives et de maintenir la taxe d’habitation pour les résidences secondaires. Mais tout n’est pas plié pour autant et les associations d’élus locaux essayent de s’infiltrer pour réaffirmer leurs propositions et tenter d’influencer l’exécutif jusqu’au dernier moment.  

France Urbaine préfère la CVAE à la TVA

L’Association des métropoles, communautés urbaines, communautés d’agglomération et grandes villes réaffirme sa demande de compensation pour les intercommunalités de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales par la part départementale de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Cette solution de transfert de la CVAE présente du reste selon elle deux avantages significatifs. Premièrement, une partie importante des intercommunalités (EPCI)disposent de compétences en matière de développement économique. Transférer la CVAE permettrait de garder une fiscalité en lien avec cette compétence. Deuxièmement, la CVAE est un impôt territorialisé, et comme l’explique François Rebsamen, co-président de la commission Finances et fiscalité de France urbaine et maire de Dijon, ” nos villes se développent en se concurrençant. Si tout le monde touche la même chose, les villes ne seront plus incitées à se décarcasser “. Oui, mais le gouvernement n’a pas souhaité braquer davantage les départements auxquels il retire déjà leur part de foncier bâti ainsi que leur pouvoir de modulation des taux, ni le Medef déjà très hostile à cette réforme et qui ne veut pas que l’on modifie la répartition des impôts de production. Il ne veut donc pas se mettre à réformer la répartition actuelle de la CVAE que se partagent les régions (8,8 milliards d’euros), les départements (4,2 milliards) et le bloc communal (4,7 milliards) et c’est pourquoi le gouvernement préfère le transfert d’une part de TVA en direction des intercommunalités.  

France Urbaine soulève d’autres inquiétudes

Dans un premier temps, elle craint une baisse importante de la production de logements sociaux, et François Rebsamen de renchérir ” avec la disparition de la taxe d’habitation et la faible compensation des exonérations de foncier bâti accordées aux bailleurs sociaux, quel intérêt demain pour un maire de construire du logement Social “. Dans un deuxième temps, France urbaine regrette également la disparition du lien entre les contribuables et leur commune. “Dans certaines grandes villes, 80% des habitants sont locataires et ne seront donc plus contribuables “. Les représentants de France urbaine espèrent de nouvelles annonces après les municipales et lors du projet de loi de finances pour 2020, l’ouverture de nouvelles concertations autour du nouvel acte de décentralisation et la possibilité d’aller beaucoup plus loin avec la future loi sur la différenciation territoriale.  

Villes de France réclame des garanties 

Ville de France craint une réduction des compensations avec la disparition de la taxe d’habitation sur les résidences principales. ” Un système de transfert de taxe foncière des départements aux communes dans lequel l’état est obligé de mettre un milliard d’euros pour que le compte y soit pose problème ” ironise Jean-François Débat. ” Comment s’assure-t-on que ce milliard promis sera bien versé et réévalué tous les ans. Nous ne voulons pas être la variable d’ajustement des économies budgétaires de l’Etat ” insiste-t-il. L’association d’élus redoute une négociation annuelle des compensations au parlement qui rappellerait les marchandages auxquels nous assistons pour la dotation globale de fonctionnement, et elle pose la question de confiance : ” est-ce que chaque commune verra ses bases compensées évoluer comme la taxe d’habitation “.  

L’Assemblée Des Communautés de France (ADCF) veut réformer en deux temps

  Pour Charles-Eric Lemaignen : ” il faut d’abord définir le panier de remplacement des recettes du bloc communal pour organiser, dans un second temps, les clefs de partage entre communes et intercommunalités “. L’assemblée souhaite d’une part expertiser les hypothèses sur la table avant la bascule de 2021, et d’autre part éprouver les mécanismes de redescente du foncier bâti et le dispositif de correction intégré à la source. Enfin, pour l’ADCF, la suppression de la taxe d’habitation et le travail sur la réforme fiscale nécessitent une remise à plat des différents flux financiers qui existent au niveau du bloc communal. Ces flux financiers, ce sont entre autres les attributions de compensation, mais également la dotation de compensation de la part salaire intégrée dans la DGF intercommunale et qui en constitue la part principale. Et ajoute l’ADCF, nous voulons bien d’une part de TVA, mais pour compenser l’érosion forte de cette DGF, et pas pour compenser la disparition du produit de taxe d’habitation. Elle propose de créer une clef de répartition Taxe foncière/ TVA entre communes et intercommunalités au prorata de la clef de partage actuelle de la taxe d’habitation. La réforme fiscale devra, dans tous les cas, laisser des marges de manœuvre aux élus pour négocier au sein du bloc communal leur propre répartition des recettes.  

L’Association des Petites Villes de France estime qu’il s’agit du scénario le moins défavorable aux communes

Pour l’APVF, le choix de descendre la taxe foncière départementale ” sûre et dynamique ” est adapté aux compétences des communes. C’est le scénario le moins défavorable aux Maires ” en ce qu’il préserve le mieux leur pouvoir fiscal et que le produit du foncier bâti des départements suffit quasiment à compenser la perte de taxe d’habitation des communes “.  L’association demande que ” les masses financières concernées par le mécanisme correcteur soient les plus faibles possibles et que leur répartition réponde à une logique de péréquation permettant de corriger réellement les inégalités affectant les ressources, mais également les inégalités relatives aux charges, entre les collectivités locales “. Elle suivra avec une attention toute particulière les modalités de compensation financière des départements qui demeurent des alliés incontournables pour les petites villes, et elle s’opposera à la mise en place et à la pérennisation au-delà de 2023 de tout mécanisme d’encadrement ou de gel des taux.”